Au terme d'intenses négociations menées par le médiateur international Lakhdar Brahimi pour trouver une solution à dix-neuf mois d'un conflit sanglant, l'armée syrienne a fini par annoncer, jeudi 25 octobre, qu'elle cesserait ses opérations militaires pour la fête de l'Adha, fête du sacrifice (appelée également Aïd El-Kébir), la plus sacrée des fêtes religieuses musulmanes. "A l'occasion de l'Aïd Al-Adha, le commandement des forces armées syriennes annonce l'arrêt des opérations militaires sur le territoire de la république à partir de vendredi matin et jusqu'à lundi", selon un communiqué lu à la télévision d'Etat. Le texte ne précise pas l'heure de début et de fin de cette trêve, alors que les belligérants s'affrontent à travers tout le pays.
Cet accord de principe n'a pas empêché les troupes syriennes de bombarder le quartier de Hadjar Al-Assouad, dans le sud de Damas, quelques heures après la diffusion du communiqué. Selon des témoins interrogés par Reuters, des tirs, en provenance d'un sommet des abords de la capitale, ont visé ce quartier populaire. Aucun bilan n'a été avancé.
CHACUN SE RÉSERVE "LE DROIT DE RIPOSTER"
Les rebelles, qui avaient déjà donné leur accord au cessez-le-feu proposé par M. Brahimi, ont indiqué qu'ils se réservaient
"le droit de riposter".
"Nous allons respecter le cessez-le-feu à partir de vendredi si l'armée syrienne en fait autant. Mais si elle tire une seule balle, nous répondrons avec cent balles", a affirmé le général Moustapha Al-Cheikh, chef du commandement militaire supérieur de l'Armée syrienne libre (ASL)
. L'état-major syrien a également souligné qu'il se réservait le droit de riposter "
si les groupes terroristes armés continuent à tirer sur les civils et les forces gouvernementales ou à attaquer les biens publics et privés".
La méfiance entre les deux camps est telle que selon un diplomate, sous couvert de l'anonymat, M. Brahimi aurait déclaré aux ambassadeurs des quinze pays membres du Conseil de sécurité
"ne pas pouvoir être sûr que la trêve tiendra".
"PAS DE TRÊVE AVEC CE RÉGIME QUI FAIT COULER LE SANG"
Le succès de cette trêve, âprement négociée par l'émissaire de l'ONU, reste incertain. Le général Moustapha Al-Cheikh a ainsi tenu à préciser qu'il ne parlait au nom de tous les rebelles.
"Il n'y a pas de commandement unifié de toutes les factions. Nous parlons au nom d'un assez grand nombre de combattants, mais il y a d'autres factions armées qui suivent d'autres commandements", a-t-il dit.
De fait, dès mercredi soir, le groupe djihadiste Al-Nosra, une milice salafiste qui multiplie les attentats-suicides contre les bases militaires du régime, a ainsi annoncé mercredi qu'il rejettait ce cessez-le-feu :
"Il n'y a pas de trêve entre nous et ce régime qui fait couler le sang des musulmans, affirme-t-il, disant se méfier des intentions du régime du président Bachar Al-Assad.
Nous, si Dieu le veut, ne sommes pas parmi ceux qui donnent une chance aux comploteurs pour nous tromper."
Un précédent cessez-le-feu conclu en avril n'avait duré que quelques jours. L'impasse diplomatique avait entraîné la démission quelques mois plus tard du prédécesseur de Lakhdar Brahimi, l'ancien secrétaire général des Nations unies Kofi Annan. Avec cette trêve, M. Brahimi espère faire émerger un
"processus politique" pour une sortie de crise dans le pays, en proie depuis plus de dix-neuf mois à une révolte devenue conflit armé, qui a fait, selon l'OSDH, plus de 34 000 morts.