Manuscrit A Folio 59 Verso.
oubliettes souterraines... En visitant ces affreuses prisons je me croyais au temps des martyrs et j'aurais voulu pouvoir y rester afin de les imiter !... Mais il fallut promptement en sortir et passer sur le pont " des soupirs ", ainsi appelé à cause des soupirs de soulagement que poussaient les condamnés en se voyant délivrés de l'horreur des souterrains auxquels ils préféraient la mort... Après Venise, nous sommes allés à Padoue, où nous avons vénéré la langue de Saint Antoine puis à Bologne où nous avons vu Sainte Catherine qui garde l'empreinte du baiser de l'Enfant Jésus. Il est bien des détails intéressants que je pourrais donner sur chaque ville et sur les mille petites circonstances particulières de notre voyage mais je n'en finirais pas, aussi je ne vais écrire que les détails principaux. Ce fut avec joie que je quittai Bologne, cette ville m'était devenue insupportable par les étudiants dont elle est remplie et qui formaient une haie quand nous avions le malheur de sortir à pied, et surtout à cause de la petite aventure qui m'est arrivée avec l'un d'eux, (NHA 613) je fus heureuse de prendre la route de Lorette. Je ne suis pas surprise que la Ste Vierge ait choisi cet endroit pour y transporter sa maison bénie, la paix, la joie, la pauvreté y règnent en souveraines ; tout est simple et primitif, les femmes ont conservé leur gracieux costume italien et n'ont pas, comme celles des autres villes, adopté la mode de Paris ; enfin Lorette m'a charmée ! Que dirai-je de la sainte maison ? Ah ! mon émotion a été profonde en me trouvant sous le même toit que la Sainte Famille, en contemplant les murs sur lesquels Jésus avait fixé ses yeux divins, en foulant la terre que Saint Joseph avait arrosée de sueurs, où Marie avait porté Jésus entre ses bras, après l'avoir porté dans son sein virginal... J'ai vu la petite chambre où l'ange descendit auprès de la Sainte Vierge... J'ai déposé mon chapelet dans la petite écuelle de l'Enfant Jésus... Que ces souvenirs sont ravissants !...