Manuscrit A Folio 56 Verso.
Il faut que je m'arrête, si je continuais de parler sur ce sujet, je ne finirais pas !... Je vais, ma Mère chérie, vous raconter mon voyage avec quelques détails ; pardonnez-moi si je vous en donne trop, je ne réfléchis pas avant d'écrire, et je le fais en tant de fois différentes, à cause de mon peu de temps libre, que mon récit vous paraîtra peut-être ennuyeux... Ce qui me console c'est de penser qu'au Ciel je vous reparlerai des grâces que j'ai reçues et que je pourrai le faire alors en termes agréables et charmants... Plus rien ne viendra interrompre nos épanchements intimes et dans un seul regard, vous aurez tout compris... Hélas, puisqu'il me faut encore employer le langage de la triste terre, je vais essayer de le faire avec la simplicité d'un petit enfant qui connaît l'amour de sa Mère... Ce fut le 7 novembre que le pèlerinage partit de Paris, mais Papa nous conduisit dans cette ville quelques jours avant pour nous la faire visiter. Un matin à trois heures, je traversai la ville de Lisieux encore endormie ; bien des impressions passèrent dans mon âme à ce moment. Je sentais que j'allais vers l'inconnu et que de grandes choses m'attendaient là-bas... Papa était joyeux ; lorsque le train se mit en marche, il chanta ce vieux refrain : " Roule, roule ma diligence, nous voilà sur le grand chemin. " Arrivés à Paris dans la matinée, nous commençames aussitôt à le visiter. Ce pauvre petit Père se fatigua beaucoup afin de nous faire plaisir, aussi nous eûmes bientôt vu toutes les merveilles de la capitale. Pour moi je n'en trouvai qu'une seule qui me ravit, cette merveille fut : " Notre-Dame des Victoires " Ah ! ce que j'ai senti à ses pieds, je ne pourrais le dire... Les grâces qu'elle m'accorda m'émurent si profondément que mes larmes seules traduisirent mon bonheur, comme au jour de ma première communion... La Sainte Vierge m'a fait sentir que c'était vraiment elle qui m'avait souri et qui m'avait guérie. J'ai compris qu'elle veillait sur moi, que j'étais son enfant, aussi je ne pouvais plus lui donner que